René Mailhes
Rappelons que René Mailhes, guitariste né gitan, a toujours su préserver son jeu de la pâle imitation du génial manouche, et qu’il s’est toujours fait un devoir de suivre son propre chemin musical. Inspiré de guitaristes américains comme Barney Kessel, Kenny Burrell ou même Jim Hall (dont il se rapproche parfois dans le côté "minimaliste" d’un jeu de guitare refusant toute démonstration technique), il admire tout autant le travail de Coltrane, de Lennie Tristano ou plus encore de Bill Evans dont l’esthétique unique l’a profondément et définitivement séduit.
Entouré de vieux complices, Dominique Lemerle à la basse (et à l’archet s’il vous plait...) et du pianiste Patrice Galas qui était déjà de l’aventure des deux précédents albums, René Mailhes nous propose aujourd’hui une musique qui frappe par son originalité. Outre des arrangements qu’on devine souvent réfléchis, tant dans les reprises de standards (Stella by starlights, Where or when) que dans les compositions du guitariste (Chtildo, Dawn Dann...), c’est surtout le chant de Gilda Solve qui surprend, sa voix étant utilisée ici comme un véritable instrument. C’est parfois réussi, toujours original, mais j’avoue que ses "Dou, ba dou..." et son scat ne m’ont pas entièrement convaincus. Par ailleurs, il est fort regrettable que la qualité technique de l’enregistrement ne soit pas à la hauteur de l’évènement discographique (la guitare et surtout le piano souffrent d’une réverbération parfois insupportable...). Une meilleure prise de son aurait su mettre en avant l’intimité et les subtilités harmoniques de cette session.
Mais au delà de ces petites frustrations techniques, la guitare, simple et délicate, parfois même déroutante de Renè Mailhes est bien là. Un titre retiendra d’ailleurs particulièrement l’attention : My wife Mado, petit poème en solo offert à la mémoire de sa femme, dont l’intimité, l’émotion et l’amour transparaissent au travers chaque note. Qu’on l’aime ou pas, la musique de René Mailhes est et restera toujours infiniment touchante.