La Rue Kétanou
C’est le Théâtre du Fil, compagnie d’art du spectacle de Savigny-sur-Orge (91), qui fut le point de rencontre des trois chansonniers. Et c’est à travers les tournées de la troupe qu’ils prendront goût au voyage et à la bohème.
Florent Vintrigner écrivait déjà des chansons le jour où Mourad Musset, croisé au hasard d’une rue, l’entraine dans ce théâtre ouvert à tous. Si enfant, il écrivait des poèmes pour séduire sa voisine de classe, c’est lorsqu’il apprend qu’il ne faut pas obligatoirement faire du solfège pour jouer d’un instrument de musique, qu’il ose toucher une guitare. Depuis ce jour là, Florent compose. Au Théâtre du Fil, il écrit des chansons pour les animations du lieu, à chaque fois sur un thème précis. Un répertoire naît. Il commence à se produire dans de tous petits lieux de la capitale. Un jour, l’immense Allain Leprest le repère. Le rendez-vous est pris tous les lundi chez le « professeur » de 00h00 à 5h00 pour écrire, parler, faire des chansons toute la nuit, dans la fumée des gitanes.
Mourad Musset, lui, a grandit avec les disques de Raina Rai et les musiques du village d’origine de sa mère. Si Public Enemy, NTM, I AM seront ses disques de chevet d’ado, c’est Florent qui lui fera véritablement découvrir la chanson. Le Théâtre du Fil lui permettra d’assouvir sa passion d’acteur. Un talent qu’il exerce toujours aujourd’hui dans la pièce Au pied du mur sans porte où il tient le rôle principal de Libellule, mis en scène par Lazare, lui aussi rencontré au Théâtre du Fil. La pièce connait depuis 2013 un succès fulgurant (programmé dans le In du festival d’Avignon, complet tous les soirs, critiques dithyrambiques de la presse).
Au Théâtre du Fil, Florent et Mourad rencontrent Olivier Leite. Si à la maison, ce sont les disques d’Aznavour et d’Edith Piaf qui tournent en boucle, ce sera surtout le rock des 70’s qui le marquera au fer rouge : les Doors, Zappa, Pink Floyd et autres Deep Purple l’accompagneront à l’adolescence. La flamme qui habite ces groupes, cette énergie et cette volonté de tout donner à la scène, Olivier la porte en lui. Quiconque l’a vu sur scène, que ce soit dans La Rue Kétanou ou dans Batignolles et Mon Côté Punk (avec Mourad) le comprendra. Très jeune, il passera des batteries de cuisines à la batterie tout cour, puis à la guitare. Après avoir étudié au Lycée Auto-Géré de Paris, il entre au Théâtre du Fil. Il joue dans plusieurs films (notamment Gagner la vie de Juan Canijo et le court métrage Noctambule de Pascal Tesseau).
En 1999, Florent écrit un spectacle mettant en scène les personnages de maître Barbès (Mourad), de Beaubourg (Olivier) et de Belleville (lui-même), deux guitares et un accordéon. A l’Ile de Ré, à la Rochelle, dans la rue, dans les bars, les petites salles, partout où il passe, le trio de chanteurs et comédiens séduit, avec cette phrase d’accroche « C’est pas nous qui sommes à la rue, c’est La Rue Kétanou ». Au gré de leur pérégrinations, s’accumulent les rencontres. Celles de Tryo, en 2000 est déterminante. Ces derniers produiront le 1er album de La Rue Ketanou. Un formidable bouche à oreille nourrit par leurs prestations toujours généreuses leur permet d’attirer un public toujours plus nombreux. Patricia Bonnetaud du Label YELEN MUSIC, militante de la première heure aujourd’hui disparue, à laquelle ils rendent hommage dans le titre « Patricia », les signe. Un 2ème album sort en 2001, le succès éclate. Des Vielles Charrues au Paléo Festival jusqu’aux Francofolies de La Rochelle, La Rue Ketanou prend une ampleur immense, devenant l’un des groupes emblématiques de toute une génération avide de liberté, de grand air, de chansons francophones qui les fassent rêver et qu’ils puissent chanter, simplement avec une guitare, à la manière des chansons de Renaud ou de Graeme Allwright.
15 ans après, La Rue Ketanou est toujours là. Ils sortent un 6ème album « Allons voir ». Comme une invitation, nous vous dirons « Venez voir ». Vous en ressortirez le cœur un peu plus plein.