Ils défendent le "droit à la fête". Accusés d'être responsables des nuisances sonores, des problèmes de drogues et d'alcool (alors que 87% de la vente d'alcool se fait en supermarchés), les bars font office de boucs émissaires. De 200 000 établissements en 1960, ils ne sont plus que 32 000 aujourd'hui. Sommés de travailler en sourdine. En 1999, une douzaine de patrons de lieux alternatifs basés sur Nantes décidèrent de s’unir pour créer un premier festival "culturo-citoyen". Aujourd'hui, le collectif Culture Bar-Bars a essaimé partout en France, son festival se déroulant dans 56 villes et accueillant plus de 1700 artistes amateurs et professionnels dans 230 cafés-concerts. A Paris, le festival pose ses premières pierres ; il se tiendra dans une douzaine de bars, en majorité dans le 11ème arrondissement (Au Chat Noir, La Cantada II, L'International, Les Fabricants, Le Onze bar, L'Orange Mécanique etc.), et espère rassembler 15 000 personnes. Au niveau musical, il y en aura pour tous les goûts, à l'image de la société multi-culturelle. Ces "cafés cultures" en sont la vitrine.
Rues Bar-Bars
Le rôle de ce collectif ? Jouer à la fois le régulateur des bonnes pratiques sur le terrain et constituer une force de proposition vis-à-vis des politiques. "Nous sommes le son de cloche de la nuit", résume Fabrice Buresi, président de l'antenne régionale Paris/IDF et propriétaire de deux bars, le Paloma et le Cabinet des Curiosités. Face à une réglementation "liberticide" pour ces "lieux de sociabilité et de citoyenneté", le collectif ne manque d'idées. On lui doit notamment la création du dispositif national d'aide à l'emploi artistique, qui prévoit une prise en charge du cachet des artistes par les régions et les municipalités. Ce n'est pas du luxe, notamment à Paris, où les patrons marchent sur le fil du rasoir : face à la "gentrification" de la population (les noceurs d'hier, devenus pères, aspirent au calme et se regroupent en associations de riverains), les normes de sécurité et anti-bruit sont de plus en plus contraignantes : insonorisation des espaces (environ 125 euros/m2), limiteur de son, présence d'un "chuteur" (une personne chargée de réguler les clients à la sortie du bar), la facture s'allonge dangereusement. Ainsi, le Café Gibus a investi 700 000 euros pour être en règle. "Pour un bar-concerts, sans subventions et face à la sur-enchère des programmations des festivals et des salles institutionnelles, c'est intenable", regrette Buresi. L'an dernier, certains patrons d'Oberkampf et des rues annexes boycottèrent la Fête de la Musique sur le thème : "Marre de faire les amuseurs publics un soir dans l'année, tout ça pour se faire emmerder les 364 jours restants !". Une opération exceptionnelle, les gérants et propriétaires préférant, par nature, les soirées "portes ouvertes", à l'image de leur événement. Plus qu'un simple festival, le collectif propose un foisonnement de spectacles vivants (concerts, soirées DJ, ex-positions, théâtre, poésie, etc.) et met en scène la diversité culturelle, "notre ADN", conclut Fabrice. Les Bar-Bars réinventent la nuit.